Mines au Katanga: Rapport accablant d’Amnesty International sur les violations des droits humains

Des creuseurs dans les mines au katanga

La question des mines devient un autre point de discrédit de l’image de la République démocratique du Congo sur le plan international. Après la suspension de la RDC de l’Initiative pour la transparence des industries extractives (ITIE) pour deux ans à cause du manque de transparence dans la gestion des ressources minières, c’est au tour d’Amnesty international de dresser un tableau sombre de l’exploitation des mines dans la province du Katanga.

L’ONG internationale des droits de l’homme a rendu publique, le mercredi 19 juin 2013, un rapport accablant intitulé « Pertes et profits. Exploitation minière et droits humains dans le Katanga, en République démocratique du Congo rendu public », mettant en cause les compagnies minières chinoises. Celles-ci exploitent de gros volumes de cobalt et de cuivre de la RDC ; et une importante partie de ces minerais continue d’être extraite par des petits exploitants artisanaux (les creuseurs) qui travaillent avec des outils manuels et dans des conditions souvent infrahumaines.

Le rapport évoque les conséquences de l’industrie minière dans cette partie du sud-est de la RDC. Il s’agit d’un certain nombre d’éléments relatifs aux graves atteintes aux droits humains dont sont auteurs des entreprises minières étrangères et locales qui exploitent le sous-sol katangais. On parle des expulsions forcées (prohibées par le droit international) et l’imposition de conditions de travail dangereuses et constituant des formes d’exploitation. Le rapport fait par exemple état de 300 familles expulsées de force de leurs logements à Luisha lors que la compagnie chinoise Congo International Mining Corporation (CIMCO) a obtenu les droits d’exploitation du site au centre de la ville.

L’on apprend par ailleurs que le 19 avril 2012, des employés de la société sino-congolaise COMILU, accompagnés de policiers, ont utilisé des bulldozers et des pelleteuses pour creuser une profonde tranchée d’environ trois mètres de large, bloquant une route rurale qui traverse la concession de l’entreprise à Luisha. Depuis des dizaines d’années la population locale utilisait cette route pour se rendre aux champs et pour aller chercher de l’eau. Lorsque les habitants ont protesté, la police a tiré en l’air des balles réelles, tuant un homme d’une balle perdue. Amnesty International a aussi constaté que les creuseurs du site de Tilwezembe (à 30 km de Kolwezi) travaillent dans des conditions abusives et dangereuses, subissant aussi de mauvais traitements. Systématiquement exploités, leurs revenus sont maigres et il en meure chaque année un grand nombre suite à des accidents de travail et de glissement de terrain, d’éboulement de rochers ou d’asphyxies découlant d’absence de ventilation dans des puits.

«Depuis plusieurs dizaines d’années, l’exploitation minière en RDC donne lieu à des atteintes aux droits fondamentaux des mineurs artisanaux et des communautés voisines des mines. Non seulement les autorités congolaises n’ont rien fait pour empêcher les compagnies minières et les marchands de bafouer les droits fondamentaux de la personne, elles ont elles-mêmes commis des violations de ces droits afin de faciliter les opérations d’extraction. Le fait que les autorités congolaises n’ont pas protégé les droits humains ne décharge pas les compagnies de leurs propres responsabilités pour leurs actions et omissions. Il est troublant que certaines compagnies aient évoqué l’implication de la police pour se justifier d’avoir elles-mêmes contribué à des violations des droits humains», déclaré Audrey Gaughran, directrice du programme Thématiques mondiales d’Amnesty International dans le rapport qui souligne la part de l’Etat dans ces atteintes graves aux droits humains dans les mines du Katanga.

Et pourtant, les Principes directeurs des Nations Unies relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme stipulent les entreprises doivent respecter l’ensemble des droits humains ; et que les Gouvernements des pays où elles opèrent doivent veiller pour que ces entreprises ne bafouent pas les droits humains. « Nous prions instamment toutes les compagnies ayant des intérêts dans l’activité minière en RDC de cesser de présenter des excuses et, au lieu de cela, de commencer à montrer qu’elles sont déterminées à respecter les droits des communautés là où elles mènent leurs activités », a plaidé Audrey Gaughran.

Et de conclure : «Une plus grande transparence dans la chaîne d’approvisionnement pourrait contribuer à empêcher que soient commises des atteintes aux droits humains telles que celles constatées à Tilwezembe. Si toutes les entreprises impliquées dans l’industrie extractive veillaient à effectuer de temps en temps des contrôles de diligence raisonnable pour veiller à ne pas acquérir du minerai et des minéraux extraits dans des conditions dégradantes ou d’exploitation, un grand pas serait fait vers un assainissement du commerce des produits miniers ».

Martin M.